Culture et Voyages

Car l'un ne va pas sans l'autre !

Peinture et art contemporain : depuis 1970

Peinture et art contemporain : depuis 1970

 

Beaucoup de peintres de style japonais sont honorés de prix et de récompenses à la suite de la demande populaire renouvelée pour l’art de style japonais à partir du début des années 1970. De plus en plus, les peintres modernes internationaux sont également attirés par les écoles japonaises tandis qu’ils se détournent des styles occidentaux dans les années 1980. La tendance vise à la synthèse de l’Orient et de l’Occident. Certains artistes ont déjà franchi le fossé entre les deux mondes, comme la remarquable Toko Shinoda (1913-2021). Ses audacieuses abstractions sumi à l’encre sont inspirées par la calligraphie traditionnelle mais réalisées comme expressions lyriques de l’abstraction moderne.

Tous les « ismes » du monde de l’art New York-Paris sont adoptés avec ferveur au cours des années 1970. Après les abstractions des années 1960, les années 1970 voient un retour au réalisme fortement imprégné des mouvements artistiques Op Art et Pop art, représentés dans les années 1980 par les œuvres explosives d’Ushio Shinohara. Beaucoup de ces artistes avant-gardistes travaillent à la fois au Japon et à l’étranger et remportent des prix internationaux. Ils estiment qu’il n’y a « rien de japonais » dans leurs œuvres et de fait, ils appartiennent à un courant moderne international. De nombreux graphistes se servirent du Pop Art, en tant qu’art populaire, pour valoriser leur savoir faire et l’héritage des collages éclectiques surréalistes, tout autant que les couleurs criardes de la publicité des années 1970-1980 dans une multitude d’usages ironiques ou subversifs. Yokoo Tadanori127 revendiquait, comme beaucoup d’autres, de poursuivre la voie de l’ukiyo-e et la transposition de la gravure ancienne dans les moyens modernes de la reproduction des images, comme la sérigraphie pour ces artistes-designers128.

À la fin des années 1970, la recherche de qualités japonaises et d’un style national amène de nombreux artistes à réévaluer leur idéologie artistique et à se détourner de ce que certains pensent être les formules vides de l’Occident. Dans le cadre du langage moderne, quelques peintures contemporaines font allusion à des valeurs japonaises traditionnelles. Quelques artistes du groupe Mono-ha (dont l’artiste d’origine coréenne mais vivant entre le Japon et Paris, Lee Ufan) pratiquent la peinture. Le choix du terme japonais mono est significatif ; d’origine yamato kotoba, il existait dans la langue de l’archipel avant l’introduction des vocables sino-japonais. Selon Michael Lucken, « c’est la chose primordiale qui constitue le monde dont chacun procède ». Cette peinture « veut attirer l’attention sur ce qui n’est pas visible »129.

Le style japonais, c’est-à-dire les peintures nihonga, poursuit, comme durant la période d’avant-guerre, le renouvellement des expressions traditionnelles tout en conservant leur caractère intrinsèque. Certains artistes de ce style peignent encore sur soie ou sur papier avec des couleurs traditionnelles et de l’encre, tandis que d’autres utilisent de nouveaux matériaux, tels que les acryliquesKayama Matazo, jusque dans les années 1990, sait renouveler le style de l’école Rinpa en évoquant le paysage par des procédés graphiques géométrisés au bel effet décoratif qui semblent avoir essaimé dans les estampes numérique de Chiho Aoshima, dans les années 2000130, mais où ces références se mêlent à celles de l’univers des animes. Par ailleurs, le naturalisme décoratif de l’école Rinpa se retrouve aussi, mais déplacé dans le champ de l’abstraction, dans l’œuvre des années 1980 de Hikosaka Naoyoshi131.

 

 

24 avr. 2023

Shin hanga – Les estampes modernes du Japon (1900-1960) L’exposition Shin hanga présentait pas moins de 220 estampes japonaises provenant de deux collections privées des Pays-Bas, ainsi que des croquis, épreuves et estampes provenant de la collection du petit-fils de l’éditeur Watanabe. Ces œuvres étaient complétées par un choix d’estampes Shin hanga de la collection du Musée Art & Histoire. Le mouvement Shin hanga (littéralement : « nouvelle estampe ») est un mouvement de renouveau de l’estampe traditionnelle (ukiyo-e) au début du 20e siècle. L’éditeur Watanabe Shōzaburō (1885-1962), constatant la diminution de la production xylographique due à la concurrence des nouvelles techniques importées telles que la photographie et la lithographie, sera le plus grand promoteur du mouvement. Il rassemblera autour de lui des artistes dont il fit réaliser les dessins selon les techniques traditionnelles de l’impression sur bois. Tout en reprenant les thèmes classiques comme les paysages, les jolies femmes (bijin), les acteurs de kabuki, les fleurs-et-oiseaux, les estampes Shin hanga reflètent aussi le Japon qui se modernise et elles séduisent par une nouvelle esthétique et une qualité de production extrêmement soignée. Les artistes exposés étaient Kawase Hasui, Itō Shinsui, Ohara Koson, Kasamatsu Shirō, Komura Settai, … Une très belle exposition! Source:https://www.artandhistory.museum/fr/s…

Musique : Sofiane Pamart 

Site officiel

Par ailleurs, les œuvres d’un certain nombre de peintres japonais contemporains sont largement inspirées des sous-cultures anime et autres aspects des cultures populaires. Takashi Murakami est peut-être parmi les plus célèbres et populaires d’entre eux. Murakami a eu, pendant 11 ans, une formation en peinture nihonga132, son travail se concentre sur l’expression des questions et des préoccupations de la société japonaise d’après-guerre au moyen de formes généralement perçues comme apparemment anodines. Il s’inspire largement des animes, mais produit des peintures sur soie, des lithographies et aussi des sculptures, donc dans des médias plus traditionnellement associés aux beaux-arts. Il brouille ainsi intentionnellement les lignes entre l’art commercial et populaire, et les beaux-arts. L’effet de brouillage qui pose question s’étend bien au-delà. Ainsi la référence à l’école Rinpa133 vu comme la manifestation parfaitement contrôlée d’une expression libre, déborde avec Murakami d’une sensation de vitesse qui semble incontrôlée, voire transgressive. De même, l’animisme qu’il donne à ses fleurs, au sourire épanoui mais qui prolifèrent à l’infini comme autant de végétaux hybrides, produit un effet bizarre, décalé, inquiétant quoiqu’elles puissent faire référence aussi à l’école Rinpa. En fait ses procédés posent un regard interrogateur sur les complexités du millénaire actuel, sur ce qu’est le Japon dans ce monde, et au plan artistique sur ce que signifie l’« expression libre », tout ce qu’il traduit par « Superflat »134. Dans le même esprit de brouillage, Miran Fukuda propose dans ses créations un « glissement de version » où elle nous présente des versions inédites des chefs-d’œuvre de l’Histoire de l’Art135.

© 2024 Culture et Voyages

Thème par Anders Norén