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Car l'un ne va pas sans l'autre !

Maurice Blondel

Maurice Blondel, né le  à Dijon et mort le  à Aix-en-Provence, est un philosophe français. Il a développé une philosophie de l’action intégrant des éléments du pragmatisme moderne dans le contexte de la philosophie chrétienne.

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Façade de la maison de Blondel à Aix-en-Provence.
 

 

 

Biographie

Blondel appartient à une très ancienne famille de Bourgogne. Il vit son enfance à Dijon dans « une demeure historique entourée d’ombre, de paix et de tendresse1». Il est admis à l’École normale supérieure à Paris en 1881. Sa famille possède une maison d’été à Saint-Seine-sur-Vingeanne et c’est dans cette propriété qu’il rédige sa thèse, soutenue le . Le sujet et le titre : L’Action – Essai d’une critique de la vie et d’une science de la pratique étonnent.

Sa position, pour la réhabilitation, d’un point de vue philosophique, de la légitimité du problème religieux, entraîne un certain flottement dans sa nomination à l’Université. Jean Lacroix note les oppositions qu’il rencontre du côté universitaire : « on lui refusa deux ans un poste dans l’enseignement supérieur, sous prétexte qu’il était plus théologien que philosophe. On reconnut vite cette méprise et, en avril 1895, il était nommé à l’Université de Lille2. » Il y est nommé en tant que maître de conférences, puis passe l’année suivante à Aix-en-Provence où il est titularisé professeur en 1897.

En 1893, Blondel, catholique convaincu et pratiquant, fait de sa foi le principe de son existence. Il hésite encore entre un apostolat à mener comme prêtre ou comme laïc. Finalement il se marie en décembre 1894 et opte pour une carrière universitaire, appelé par une vocation « auprès des milieux intellectuels les plus éloignés du catholicisme », ce milieu universitaire alors « imprégné de mentalité rationaliste3… ». Cependant il rencontre aussi des oppositions du côté catholique, où il est critiqué non seulement pour sa thèse, mais aussi pour la Lettre sur l’apologétique, publiée en 1896. Blondel n’a cependant jamais été condamné par Rome4,5.

Blondel perd son épouse en 1919. En 1927, il est obligé de quitter l’enseignement pour raison de santé. De 1934 à 1937, Blondel, à 73 ans, refond son œuvre et resitue L’Action dans celle-ci. Il écrit et publie La Pensée en 1934, L’Être et les êtres en 1935, L’Action (sa nouvelle version) en 1936 et les deux premiers volumes de La Philosophie et l’Esprit chrétien en 1944 et 1949. Quand en  parait le statut des Juifs, il se déplace jusque chez Léon Brunschvicg, retraité visé par l’exclusion que prononce là Vichy, pour l’embrasser chaleureusement et lui témoigner son soutien6.

Émile Poulat mentionne la possibilité de la béatification de Blondel7, évoquée dans la paroisse de Blondel8.

De son mariage avec Rose Royer, qui était la fille d’Édith Royer et dont il devait rester veuf en 19199, Maurice Blondel eut trois enfants : Charles, Élisabeth, qui devait épouser Charles Flory, et André. L’historien Georges Blondel était son frère aîné et le physicien André Blondel son cousin germain, avec qui il entretint une correspondance régulière pendant un demi-siècle10.

L’Action

 

Intérieur du Panthéon au xviiie siècle, avec le décor d’origine, par Giovanni Paolo Panini

Les premières pages de L’Action, première thèse (en français) du philosophe, sont célèbres : « Oui ou non, la vie humaine a-t-elle un sens, et l’homme a-t-il une destinée? J’agis, mais sans même savoir ce qu’est l’action, sans avoir souhaité de vivre, sans connaître au juste ni qui je suis ni si je suis. Cette apparence d’être qui s’agite en moi, ces actions légères et fugitives d’une ombre, j’entends dire qu’elles portent en elle une responsabilité éternellement lourde, et que, même au prix du sang, je ne puis acheter le néant parce que pour moi il n’est plus : je serais donc condamné à la vie, condamné à la mort, condamné à l’éternité ! Comment et de quel droit, si je ne l’ai su ni voulu11?» Selon Jean Lacroix, Blondel a résumé sa philosophie dans Études philosophiques dans cette comparaison qu’il résume. « Au Panthéon d’Agrippa, à Rome, l’immense coupole n’a pas de clé de voûte, mais une ouverture centrale par où descend toute la lumière dont s’éclaire l’édifice. Ainsi la construction de notre âme, comme une œuvre inachevée, s’appuie, non à un plein, mais à un vide, vide nécessaire pour que passe l’illumination divine, sans laquelle nos yeux seraient complètement aveugles et nous ne pourrions accomplir aucune tâche. Si l’homme a une destinée véritable, qui donne un sens à la vie, il n’est pas possible que la philosophie s’en désintéresse; si cette destinée, comme l’affirme le christianisme, est surnaturelle, il n’est pas davantage possible que la philosophie l’atteigne par ses seules forces – sans quoi le surnaturel ne serait plus proprement surnaturel. De cette opposition suit le statut de la philosophie : contrainte de poser un problème qu’elle ne saurait entièrement résoudre, elle ne peut que rester inachevée tout en rendant compte de son inachèvement même. Pas de philosophie sans système; plus de philosophie si le système se ferme sur soi. En ce sens on pourrait dire que l’idée de système ouvert définit le blondélisme. Cette philosophie de l’insuffisance aboutit à une véritable insuffisance de la philosophie12

Qu’est-ce que l’action ?

L’action est une donnée primordiale, antérieure à la conscience et à la liberté dans laquelle l’homme est, dira Blondel, « embarqué », embarqué dans son drame. Il se sent le maillon d’une chaîne d’actes qui ont commencé avant lui et sans lui, mais qui se poursuivent en lui. L’homme peut s’entendre dire que ses actes portent en eux une responsabilité indéfinie et que même le suicide ne peut pas supprimer le fait qu’il a été dans l’action. La suite du passage cité au paragraphe précédent donne une idée de ce que veut Blondel : « J’en aurai le cœur net. S’il y a quelque chose à voir, j’ai besoin de le voir. J’apprendrai peut-être si, oui ou non, ce fantôme que je suis à moi-même, avec cet univers que je porte dans mon regard, avec la science et sa magie, avec l’étrange rêve de la conscience a quelque solidité. Je découvrirai sans doute ce qui se cache dans mes actes, en ce dernier fond où, sans moi, malgré moi, je subis l’être et je m’y attache. Je saurai si, du présent et de l’avenir, j’ai une connaissance et une volonté suffisante pour n’y jamais sentir de tyrannie, quels qu’ils soient13.» Ce « dernier fond où, sans moi, malgré moi, je subis l’être et je m’y attache » signifie selon Charles Moeller que « plus profondément que l’intelligence et la volonté, en mes profondeurs, je subis l’être, c’est-à-dire que je ne suis pas maître de ce fait que j’existe; je m’attache à l’être c’est-à-dire que, que je le veuille ou non, je ne puis pas ne pas agir sans cesse, préférer l’existence à la non existence, l’être au non être, l’affirmation ontologique à sa négation14

La suite du texte indique dans quel sens la solution sera cherchée : « Le problème est inévitable; l’homme le résout inévitablement; et cette solution, juste ou fausse, mais volontaire en même temps que nécessaire, chacun la porte dans ses actions. Voilà pourquoi il faut étudier l’action ; la signification même du mot et la richesse de son contenu se déploieront peu à peu. Il est bon de proposer à l’homme toutes les exigences de la vie, toute la plénitude cachée de ses œuvres, pour raffermir en lui, avec la force d’affirmer et de croire, le courage d’agir15.» Il y a cependant plus dans notre action que nous ne le pensons et une pauvreté de nos actions réelles en face d’une plénitude dont nous n’avons pas conscience, qui gît au fond de la volonté voulante.

Passage signifiant de l’Agere contra16.

Agir contre l’Adversaire

« Il est prudent de s’exercer d’avance à la lutte, de provoquer au combat des adversaires secrets tandis qu’ils semblent amortis et démasqués, et de s’habituer à les voir tels qu’ils sont, avant l’heure des surprises et des illusions. Si nous ne prenons pas l’offensive contre les ennemis de la volonté, ce sont eux qui se coalisent contre elle. Il faut se battre ; celui-là perdra nécessairement la liberté avec la vie, qui fuira le combat. Même chez les meilleurs, il y a des trésors de malice, d’impureté et de mesquines passions. Qu’on ne laisse pas ces puissances hostiles se grouper en habitudes et en systèmes ; qu’on les divise par l’attaque ; qu’on s’impose d’unir les forces fidèles contre l’anarchie, avant le temps des coalitions, des complicités et des trahisons. Sans l’attendre, il faut agir directement contre l’adversaire, le provoquer, disions-nous, éveiller, par la lutte, des états de conscience nouveaux, afin de la mater et de capter jusqu’en son origine la source des entraînements révolutionnaires. »

— L’Action, Paris, Alcan, 1937, t II, p. 222-224.

Agere contra. L’action voulue est le principe de l’action de plus en plus volontaire et libre17.

Volonté voulante et volonté voulue

La volonté voulante c’est précisément « ce dernier fond où, sans moi, malgré moi, je subis l’être et je m’y attache », quelque chose qui est au-delà de la distinction entre intelligence et volonté. Jean Lacroix écrit de Blondel et de son concept de base : « l ‘ action, c’est-à-dire toute activité humaine, qu’elle soit métaphysique, morale esthétique, scientifique ou pratique2.» Mais comme volonté voulante, soit « cet être qui est au-delà de la distinction entre intelligence et volonté (…) l’être profond est volonté voulante parce qu’il est prégnant des valeurs de vérité et d’amour qui se diversifieront plus tard au niveau des facultés conscientes18.» Moeller poursuit : « L’intelligence va proposer à la volonté voulante (qui du reste « propulse » cette intelligence même dans la quête des motifs d’action), une série de projets d’activités dont la volonté voulue va s’emparer pour les mettre à exécution. Ces projets ne peuvent être que partiels, limités dans le temps et l’espace. Aucun, pris en lui-même, ne peut épuiser d’un coup l’ampleur de la volonté voulante qui sous-tend, anime les démarches de la volonté voulue. Prenant conscience de cela, l’être humain va rechercher, d’étapes en étapes, une activité qui réalise cette égalité, cette réconciliation entre « ce qu’il veut » et ce « qu’il fait »19.» Le « ce qu’il fait » c’est la volonté voulue et le « ce qu’il veut », c’est la volonté voulante. La « volonté voulante » écrit Pierre Colin se distingue des « projets particuliers et explicites qui tentent de la traduire et de la réaliser, projets constitutifs de la « volonté voulue  »20. »

Mathias Nebel insiste sur le fait originaire de la distinction : « Avant de vouloir quelque chose , le sujet découvre en lui-même une « volonté voulante » à la source de son vouloir […] Le fait de vouloir n’est pas choisi. Cette volonté voulante s’impose nécessairement et antérieurement à tout vouloir particulier conscient21

Deux problèmes préalables : dilettantisme et nihilisme

Les partisans du dilettantisme prétendent que le problème moral n’existe pas : « Rien ne vaut rien et cependant tout arrive mais cela est indifférent22 ». Il n’y aurait qu’à « jouer pour mieux et plus impunément jouir, en goûtant et en essayant de tout pour tout percer à jour, en déchargeant ainsi l’action humaine de toute obligation ou responsabilité effective, par la double évasion de l’ironie et de la volupté 23…» Il y a dans le dilettantisme une sorte d’indifférence absolue comme le dit Zarathoustra, on veut ne rien vouloir mais dans la mesure où cette volonté de ne rien vouloir revêt malgré tout une effectivité, on se rend compte qu’elle est une volonté de soi, un égotisme comme le fait entendre Charles Moeller qui fait de cette attitude le propre de la pensée de Gide contre lequel il objecte à partir de Blondel qu’elle exclut l’engagement sans réserve, l’amour profond les attitudes que, précisément, le dilettante, prétendant pourtant vouloir tout expérimenter ne veut pas connaître.

Ou alors le dilettantisme est un nihilisme. il est la volonté de ne rien être. Mais le suicidé est animé d’un espoir secret au nom duquel il condamne le monde et désire s’anéantir. Blondel écrit : « En croyant aspirer au néant, c’est à la fois le phénomène dans l’être, et l’être dans le phénomène qu’on poursuit : voyez comme au délire des sens la passion mêle un étrange mysticisme et semble absorber dans un instant de volupté (morte en même temps que née) l’éternité de l’être et l’y faire mourir avec elle ; mais voyez aussi comme à l’abnégation mortifiante le quiétisme ajoute un désir d’indifférence, un besoin de sentir l’immolation, une joie d’abdication et toute la sensualité raffinée d’un faux ascétisme qui manifeste un sens propre, un subtil et ambitieux égoïsme, une « luxure spirituelle » : mensonge de part et d’autre, puisque la volonté finit toujours par vouloir ce qu’elle a voulu exclure, et puisqu’elle s’inflige déjà, puisqu’elle semble se préparer ainsi le supplice de la discorde intestine, où armée contre elle-même elle se déchirera de toute sa puissance. Et ce qui n’a point de cohérence ni de consistance intelligible ne subsiste qu’en prenant corps dans des actions qui, elles, réalisent en des vies désordonnées et en des œuvres intimement discordantes ces sophismes intéressés de la pensée et de la volonté défaillantes24

René Virgoulay le commente ainsi : « Le pessimisme estime que le vouloir-être fait surgir le mal et que le vouloir non-être produit le néant. » Dans le pessimisme par exemple de Schopenhauer le vouloir non-être est supposé créer, poursuit l’auteur en citant L’Action « le bienheureux anéantissement qui ne serait pas sans elle ». Mais il y a là une contradiction car pour le pessimisme, le vouloir être serait inefficace. Or son raisonnement montre bien que le vouloir-être est efficace puisqu’il produit un effet que le second doit éliminer 25.

Des ondes concentriques : de l’individu à Dieu atteint dans la superstition comme peur de la mort en passant par le couple, la famille…

 

Ondes concentriques à la surface de l’eau

Une série d’ondes concentriques de plus en plus larges, comme autour de la chute d’une pierre dans l’eau profonde, vont se déployer autour du choc initial provoqué par les « actions » (en quelque sorte sous-jacentes), de la volonté voulante et vont embrasser successivement l’individu, la société familiale, la patrie, la société politique, le monde, les forces qui dépassent le monde. Plus les ondes s’élargissent et plus l’écart entre les deux bras de la volonté voulante et de la volonté voulue est incapable de se refermer sur une réalité qui égalise l’impulsion de la volonté voulante et les réalisations effectives de la volonté voulue. Il n’y a pas de raison de s’arrêter dans la quête de cet embrassement qui devrait refermer sur elle-même l’action humaine.

La volonté voulante doit donc s’incarner dans le monde, dans des actions concrètes, même si le risque existe que cette activité l’englue dans la matière : cette sortie de soi est pour l’intention du vouloir, « l’indispensable moyen de se préciser, de s’enrichir, de se soumettre à la norme salutaire dont elle tirera le sens et la réalisation du vouloir profond et de la fin secrètement poursuivie26.» Il s’agit de se conquérir d’abord comme individu. Et ce premier rassemblement essentiel autour d’un noyau personnel creuse immédiatement un vide : « à peine espérions-nous refermer sur eux-mêmes les deux bras de la volonté voulante et de la volonté voulue, autour d’une personnalité harmonieusement équilibrée et close sur elle-même que, par l’élan même qui créait la personne, se produit un choc qui détermine une nouvelle onde, concentrique à la précédente. La personne meurt si elle ne s’ouvre pas sur le monde extérieur27…»

Ensuite, une nouvelle onde se crée qui pousse la volonté voulue à s’ouvrir aux personnes et en particulier dans l’amour humain. En apparence, ce pourrait être définitif, mais la volonté voulante veut à nouveau plus. Elle ne veut pas que les amants soient seuls au monde et dans leur union même il y a l’appel d’un autre être à l’existence : « lorsque par un mystérieux échange, deux êtres ne forment plus qu’un même être plus parfait (…) c’est quand ils sont un qu’ils deviennent trois (…) L’élan même de la passion brise le cercle magique où elle espérait peut-être s’enfermer pour jamais (…) Un tiers paraît, comme pour suppléer à l’infructueux essai de l’unité (…) il est né de l’amour (…) il le scelle dans une tombe – le berceau – qui ne rend plus ce qu’il a pris aux parents. Ils sont plusieurs, c’est la richesse. Ils sont plusieurs, c’est la pauvreté; ils ne sont plus uns. Une aube étrangère s’est levée : il faut qu’en grandissant la famille s’ouvre et se disperse, que l’affection commune se multiplie en se divisant28.» La famille est alors un nouveau « cercle magique » mais l’élan social ne peut se réaliser que dans une patrie et si l’on reste à la patrie, cet élan lui-même risque de se dessécher s’il ne s’ouvre au culte de l’humanité qui implique toujours au niveau de la volonté voulante un idéal moral universaliste. L’homme atteint alors les limites de la finitude et débouche sur les forces qui dépassent le Monde. C’est alors que la fonction fabulatrice (au sens que Bergson donne à cette expression, selon Moeller), invente des mythes pour rassurer l’homme qui prend conscience de l’abîme que la mort représente pour lui. Mais alors, dit Moeller, « l’homme se tourne vers Dieu non parce qu’il croit en lui mais parce qu’il a peur. Il essaye, par ses actions morales et rituelles, de mettre définitivement de son côté les forces irrationnelles. Cette manière d’agir cache l’instinct de puissance (…) l’acte superstitieux prétend indûment arrêter l’élan de la volonté voulante; celle-ci porte plus loin. La volonté profonde de l’homme est obligée, ici encore, d’abdiquer devant ce qui est contenu dans son désir, mais le dépasse dans ses moyens de réalisation 29

De la religion comme peur à la rencontre authentique de Dieu

D’étapes en étapes, la volonté voulue s’avère tendre à l’infini. Et elle ne peut s’arrêter sous peine de contradiction. C’est l’infini par « en-haut ». Mais il y a plus essentiel peut-être. C’est que la volonté voulante qui m’entraîne sans cesse en avant, je la découvre comme n’étant pas mienne car cette volonté voulante en moi, je ne l’ai pas voulue. Je n’ai pas demandé à être ni à agir encore plus ni non plus d’être emporté dans ce dynamisme qui me pousse sans cesse en avant : « L’action qui par « en haut » tend vers un infini de puissance, s’ouvre également, par le bas, dans le tréfonds de mon être, sur quelque chose ou quelqu’un qui m’a engagé avant que je puisse accepter ou refuser. Mon action s’ouvre par en bas, sur une transcendance30.» Ma volonté voulue doit en quelque sorte capituler devant des forces qui la dépassent. Et d’autre part, je prends conscience que je suis le sujet d’une volonté voulante qui est antérieure à ma liberté et qui me dépasse car elle ne m’appartient pas.

Charles Moeller estime que Blondel a mis en évidence « l’indestructibilité de l’action volontaire31…» Il pose la question de cette façon pour situer la problématique à laquelle s’ouvre la pensée de Blondel en ce moment de sa progression : « Je ne m’appartiens pas. On m’a embarqué. Qui?’ Pourquoi? L’action qui « par en haut » tend vers un infini de puissance s’ouvre également, par le bas, dans le tréfond de mon être, sur quelque chose ou quelqu’un qui m’a engagé avant que je puisse accepter ou refuser. Mon action s’ouvre, par en bas sur une transcendance (…) Non seulement il y a en chacun de mes actes particuliers plus, et infiniment plus que ce je vise sur le moment, – c’est même ce « plus » qui explique que j’agisse – mais ce « plus » est à son tour, enraciné, en avant de moi-même, plus haut que moi-même, en un Être transcendant qui m’a embarqué dans l’agir concret (…) Dieu apparaît ainsi comme présent dans tout le déterminisme de l’action. Le choc initial qui déclenche la série des ondes concentriques, est donné par Celui qui est « plus intime à moi-même que moi-même; la force de propulsion qui lance en avant mon action voulue est secrètement sous-tendue par cet élan initial qui est celui d’une autre volonté que la mienne. Que je le veuille ou non, je ne puis pas ne pas voir cette vérité. Je ne puis pas voir que je dois agir, que j’agis toujours, que je cherche en tout l’infini; et en même temps, au sein de ce dynamisme qui est mon « moi » le plus essentiel, je découvre que je ne puis atteindre cet infini que je veux; je sais que je n’ai jamais, à aucun instant, été capable de « vouloir vouloir » cet infini. Ma volonté voulante ne m’appartient pas. Je ne puis me passer de Dieu si je veux aboutir dans mon action à ce que je veux vraiment, et, en même temps, je ne puis m’emparer de ce Dieu, car il dépasse mes forces et transcende cette volonté voulante par laquelle je ne puis pas ne pas Le chercher»32…»

La volonté vraie

René Virgoulay a écrit dans L’Action de Maurice Blondel – 1893 – relecture pour un centenaire : « La volonté vraie, c’est la volonté voulante en tant que ratifiable ou ratifiée par la volonté voulue, c’est la volonté voulue en accord avec la volonté voulante. De même si la « vraie volonté de l’homme, c’est le vouloir divin », cela signifie que la volonté de l’homme n’est jamais aussi vraie que lorsqu’il veut ce que Dieu veut. La volonté vraie n’est pas la volonté divine en tant qu’elle priverait l’homme de son propre vouloir, mais la volonté humaine en tant qu’elle s’accomplit par consentement à la volonté divine. Le vouloir humain n’est jamais aussi authentique que lorsqu’il est reconnu comme un don33. » Et Virgoulay de citer Blondel : « Avouer sa foncière passivité, c’est, pour l’homme, la perfection de l’activité. À qui reconnaît que Dieu fait tout, Dieu donne d’avoir tout fait34. » Jean Lacroix conclut son exposé sur L’Action de Blondel dans le Dictionnaire des philosophes par ces mots : « De moi-même à moi-même il y a une distance infinie. En découvrant dans notre agir un inachèvement de droit, Blondel met à jour en nous une « place préparée », une « fissure ouverte ». On ne peut s’égaler à soi-même qu’en sortant de soi. Tout effort tend à montrer qu’il y a dès l’origine une immanence de transcendance en nous. Dérouler le déterminisme intégral de l’action, c’est creuser le vide que le surnaturel viendra combler2

Henri Bouillard a écrit que la méthode de L’Action consiste à suspendre toutes les certitudes, celles de la foi pour commencer ou même l’idée que la vie humaine a un sens : « Considérant le fait inéluctable de l’action, parcourant toute la série des attitudes possibles à l’homme dans le champ de son activité il [Blondel] relève partout une inadéquation toujours croissante entre ce que l’on croit vouloir et ce qu’on veut profondément, entre la volonté voulue et la volonté voulante. Il montre ainsi que les pensées et les actes de chacun composent dans leur ensemble comme un drame, et que ce drame amène chacun à une option inévitable entre les sollicitations du Dieu caché et celles de l’égoïsme toujours évident. Cette logique de l’action où s’enveloppent réciproquement l’existence rationnelle et le mouvement de la liberté, conduit l’homme jusqu’au point où le christianisme peut prendre sens à ses yeux. Elle ne lui impose pas la foi puisque celle-ci est un don de Dieu. Mais elle dessine en lui son lieu d’accueil et le cadre de son intelligibilité. Elle lui permet de saisir en quoi le christianisme concerne tout homme35

Une nouvelle conception de l’acte de foi

 

Roger Aubert (ici fait docteur honoris causa en 1963 de l’Université Radboud de Nimègue donne raison à Blondel

Une polémique survient en 1913, significative de cette époque. Dans La Revue pratique d’apologétique (t. 15, p. 347-361 et p. 419-435), Joseph de Tonquédec publie un article intitulé « L’idée d’immanence chez Maurice Blondel ». Pour l’auteur de l’article, Blondel nie l’idée que l’acte de foi est aussi une démarche de la raison, ce qui le met en contradiction avec Vatican I. Blondel fait parvenir une lettre à la revue, protestant contre la mésinterprétation de sa pensée, à laquelle le père de Tonquédec répond à son tour par une note. Il y cite la lettre de protestation de Blondel (le texte ci-dessous à gauche). Ensuite il compare les dénégations de Blondel à ce que lui-même a écrit dans L’Action en 1893. Tonquédec en extrait les mots (qu’il écrit en capitales) semblant montrer que Blondel écarte la dimension rationnelle de l’acte de foi : il dit que l’action est la chose qui « SEULE…ELLE… ELLE SEULE » est ce qui « révèle » l’Être (c’est-à-dire Dieu), en nous.

« Lorsque je montre que l’idée nécessaire que nous avons de Dieu ne saurait légitimement se terminer à la vue théorique et à une spéculation toujours déficiente, on s’arrange pour me faire signifier qu’elle « provient de l’action seule », COMME SI LES MOTS « L’ACTION SEULE » AVAIENT UN SENS POUR MOI !36 »

.

« C’est donc dans la pratique même que la certitude de l’« unique nécessaire » a son fondement. En ce qui touche à la complexité totale de la vie, SEULE L’ACTION est nécessairement complète et totale, elle aussi. Elle porte sur le tout, et c’est pourquoi d’ELLE, ET D’ELLE SEULE, ressort l’indiscutable et preuve contraignante de l’Être … Seul le développement total et concret de l’action le révèle donc en nous … Les subtilités dialectiques ne portent pas, etc.37 »

 

Dans Le Problème de l’acte de foi, Roger Aubert donne raison à Blondel, insistant sur le fait que celui-ci n’a pas voulu dire que l’action seule amenait à la foi, il n’a pas voulu dire que c’était elle « toute seule ». C’est elle, dit encore Aubert, qui « vient mettre le sceau final à toute une série de démarches dont les enquêtes intellectuelles ne sont nullement exclues ». La Revue pratique d’apologétique refusa le texte que Blondel lui envoya en réponse à cette note de sorte que le philosophe publia à la place une brochure en annexe à la revue Annales de philosophie chrétienne, qu’il avait acquise en 1905 et confiée à l’abbé Laberthonnière38.

La Pensée

Pour Blondel, il y a deux types de pensée, liées l’une à l’autre : la pensée noétique et la pensée pneumatique39.

La pensée noétique

« J’emploie », écrit Blondel, « le terme noétique pour désigner ce qui, dans le monde sous-jacent à la pensée consciente ou réfléchie, est irréductible à la notion commune de matérialité, au pur physique, si tant est qu’on puisse parler de cette pureté abstraite. Ce mot noétique provoquera peut-être surprise et résistance, en raison de l’idée que son étymologie même évoque, car il paraît désigner ce qui est de l’ordre supérieur à la simple conscience ou à la connaissance discursive ; dès lors, il semble étrange de l’employer pour ce qui paraît inférieur. Ce qui pourtant justifie cet emploi, en apparence prématuré, d’un mot dont on commence à abuser mais qu’il importe de garder en le précisant, c’est que l’objet réel que ce terme désigne a, en effet, un rôle permanent et très défini. Infus et agissant au plus bas, le noétique est ce qui soutient secrètement toute l’ascension, rend compte de la valeur réelle de la connaissance, prépare la pensée concrète et contemplative et permet à l’esprit de communier avec la nature et l’ordre transcendant dont il est le liant. Qu’on ne se méprenne pas sur cette présence du noétique : ce n’est pas seulement une action extérieure, desursum ; ce n’est pas non plus un produit d’une fermentation obscure et toute immanente, constatée isolément et une fois pour toutes comme un fait brut. C’est une incarnation ébauchée du νοῦς, du λόγος, d’où le nom de noétique donné à cet ingrédient réel40. » On peut parler du noétique comme de la « pensée infuse et agissante dans le monde matériel », d’une « incarnation ébauchée du νοῦς », du « principe d’objectivité intelligible41.» Le noétique n’est assimilable ni à la matière, ni à l’abstraction, il est un élément concret, le « principe ontologique de l’ordre universel42.» Unité globale et solidaire du monde, il est au principe de la possibilité de comprendre les choses et le monde, il ne peut se définir indépendamment de ce à quoi il renvoie, soit le pneumatique.

La pensée noétique est analytique, elle cherche à dégager des éléments simples et des relations définies, elle n’est que dans l’homogène. Elle tend à l’abstrait, au général, la notion, la loi. Elle est rétrospective, elle a affaire au révolu au réifié avec une propension à la suffisance. La connaissance notionnelle, qui participe de la pensée noétique, «  a pour œuvre propre la fabrication des concepts, tels que les utilisent la science positive et la philosophie de type classique : représentations abstraites et générales où le réel se trouve réduit à l’essentiel, ou du moins à ce qu’il réussit à la pensée de considérer comme tel 43.» Elle ne donne pas lieu à une connaissance directe totale.

La pensée pneumatique

« Je désigne par pneumatique », écrit Blondel, « (en me servant d’un vieux mot qui a été usité dans les écoles où prévalait le sens de la vie intérieure et de sa mystérieuse respiration) ce qui, en un être singulier, en un point spécifié et réagissant de façon qualitative, aspire le milieu universel, puis l’assimile et l’expire ensuite : secret échange qui introduit perpétuellement dans le monde du nouveau, qui, dans le noétique en quelque sorte étalé et totalisé, constitue partout des intériorités, des singuliers, des formes caractérisées, des « indiscernables » du dehors, et des diversifications indéfiniment renouvelées du dedans44.» Pour A. de Jaer et A.Chapelle, « De même que le noétique confère à l’univers son unicité et à chaque personne d’être réelle parce que dans l’univers, ainsi le pneumatique donne à chaque personne d’être elle-même en actuant la réalité unique de l’univers45

La pensée pneumatique est synthétique, elle se meut dans le divers, le multiple et les voit comme concourant à l’harmonie. Elle est prospective, regarde vers l’avenir, ce qui est à naître, à faire, elle est liée à un appel, c’est la connaissance réelle. « La connaissance réelle est celle qui, grâce à une certaine connaturalité initiale mais bien plus encore grâce à une vivante initiation progressive, nous permet de communiquer, de communier du dedans avec les êtres ou les choses, et par suite d’en juger avec rectitude antérieurement ou par delà tout système élaboré de concepts. À des titres divers en relèvent : le bon sens, le tact, les clairvoyances propres de la pratique et de l’amour, des anticipations et les vues synthétiques du génie, la sagesse et la contemplation46

L’union: distinction/des deux pensées. L’image de la luciole

 

Vols de luciole (matérialisés par les traits jaunes) dans la campagne de Nuremberg

« Entre ces deux formes de connaissance, il n’y a pas pour nous à opter : elles sont nécessaires l’une et l’autre, l’une à l’autre. Grâce à leur union seule, l’intelligence peut être à la fois clairvoyante et possédante et, sans rien concéder au goût dangereux de l’irrationnel, rester fidèle à son étymologie, commune d’ailleurs avec celle du mot intuition : non seulement ce qui sert d’agent de liaison, inter legit [lie les choses entre elles], mais ce qui voit et lit au cœur, intus legit [lit à l’intérieur des choses]. Grâce à leur union seule, peuvent se concilier en nous l’universalité d’un horizon coextensif à tout l’être et le point de vue singulier d’une conscience personnelle : la communion et l’individuation. Si elles parvenaient à se joindre et à s’unir comme elles le souhaitent normalement, le problème du connaître serait susceptible pour nous de solutions définitives et adéquates. Mais, nous le verrons, elles ne se rejoignent pas. Et par le trou, par la fissure qui subsiste entre elles, se laisse entrevoir une réalité supérieure à la pensée consciente de l’homme comme à tout le domaine qu’elle explore47.» Blondel s’est exprimé comme suit à propos de la nécessité des deux pensées, opposant le terme latin ratio pour désigner la connaissance notionelle et le terme latin intellectus pour désigner ce que Newman appelle aussi la connaissance réelle : « Comment concilier et hiérarchiser cette ratio et cet intellectus dont on nous dit que la première doit conduire au second en le contrôlant, et que cependant l’intelligence qui est virtuellement en nous demeure provisoirement prisonnière d’entraves qui empêchent son véritable exercice ? (…) Durant les lourdes nuits de juillet, dans la campagne embaumée de Grasse ou de Vence, la luciole de Provence poursuit silencieusement son étrange vol d’ombre et d’éclat intermittents. Tour à tour, elle s’allume et elle s’éteint. Tantôt elle éclaire d’un trait rapide son itinéraire capricieux en attirant le regard qui ne voit plus que ténèbres en dehors de son sillage de lumière. Tantôt elle disparaît, laissant revoir l’obscure clarté de la nuit pendant que nous nous demandons où surgira de nouveau la froide lueur qui va vers un but incertain. Ainsi nos pensées alternent et composent leur rythme vital ; et leur clarté partielle, avec ses étroites limites et ses intermittences, permet, par les éclipses mêmes, d’entrevoir l’immensité encore nocturne de la route à parcourir48.» En fait, les deux pensées ne se rejoindront pas et du fait de la fissure qui subsiste entre elles, laissent supposer une réalité supérieure à la pensée consciente de l’homme.

Du déchirement des deux pensées à l’unité de l’Esprit à l’œuvre en nous

Il y a un hiatus dans la pensée entre les deux manifestations de la pensée (noétique et pneumatique), par exemple dans la perception sensible selon que nous la considérions du point de vue des qualités éprouvées au fond de la conscience (pneumatique) ou des vibrations révélées par la physique (noétique). Ou dans la conscience du sujet, selon que nous nous placions du point de vue du moi profond (pneumatique) ou du jeu des réactions en superficie (noétique). Il faut donc poser que notre pensée profite d’une force qui échappe à sa connaissance explicite et à son empire, sans le concours de laquelle rien n’irait plus.

L’Être et les êtres (Ontologie concrète et réalisme spirituel)

La question qui se pose dans cette deuxième partie de la triologie (avant la « deuxième » Action) c’est le problème de la compatibilité des êtres contingents et de l’Être nécessaire. D’où une enquête que mène Blondel auprès de la matière, des organismes vivants et mourants, des personnes, des sociétés, de l’univers entier… Jean Lacroix écrit que tous ces êtres ne peuvent exister qu’en se suspendant « à l’être qui existe par soi ». Mais, « aussi ces êtres relatifs et contingents ont une certaine réalité et consistance. La preuve, c’est qu’il est bien possible de douter d’un objet, mais non de tous les objets : on ne nie la partie qu’en affirmant l’ensemble ou, comme le dira la phénoménologie contemporaine le doute particulier opère toujours sur horizon du monde49.» Blondel écrit en conséquence : « Nos premières enquêtes et nos critiques préliminaires nous ont amenés à cette double conclusion provisoire : rien de ce que l’usage courant nomme des êtres ne répond pleinement à ce que la réflexion découvre d’essentiel dans notre notion spontanée de l’être ; et cependant nous ne pouvons annihiler toutes ces réalités qui, sans être absolument consistantes, se soutiennent les unes les autres, au point que nous ne songeons jamais à les détruire toutes ensemble dans notre pensée50

La Philosophie et l’esprit chrétien (l’idée d’une philosophie chrétienne)

L’intervention de Blondel dans la crise moderniste

C’est après avoir longuement correspondu avec Alfred Loisy que Blondel, pressé aussi par ses amis se résolut à intervenir dans la crise moderniste en publiant le long article Histoire et dogme. Les lacunes philosophiques de l’exégèse moderne, Paris, 1904. Cet article a été reproduit dans Les premiers écrits de Maurice Blondel, PUF, Paris, 1956, p. 149-228. La critique de Blondel vise tant ceux que l’on appellera plus tard les intégristes que les modernistes. Blondel appelle les premiers les extrincésistes et les seconds les historicistes. En opposant constamment dogme et histoire tout en cherchant une conciliation neuve.

Claude Troisfontaines distingue deux définitions du modernisme, celle qui correspond aux erreurs condamnées par Pie X. Il y a selon lui une définition plus large : « un mouvement prônant en profondeur une adaptation de l’Église au monde moderne, tant sur le plan doctrinal que pratique. Si l’on accepte cette seconde perspective, on doit reconnaître que Blondel est très proche du courant moderniste dont il partage les requêtes légitimes. On peut même noter que sa « Lettre sur les exigences la pensée contemporaine51» a précédé en quelque sorte le mouvement, car c’est elle qui attire pour la première fois l’attention sur la question qui allait dominer les discussions de l’époque : comment concilier le caractère transcendant du christianisme avec la légitime autonomie de l’homme52?  »

Critique de l’apologétique courante, l’« extrincésisme » ou la « théologite »

Pour Blondel, « Si les faits chrétiens (histoire) et les croyances chrétiennes (dogme) coïncidaient à la lumière d’une expérience ou d’une évidence complète; si, du moins, l’on n’avait qu’à croire ce que d’autres ont vu et constaté, il n’y aurait aucune place pour notre difficulté53.» Geneviève Mosseray commente ce point comme suit : « Le tort d’une apologétique, courante à l’époque, était de déclarer que la Bible était garantie en bloc par l’autorité divine et que dès lors l’enseignement chrétien découlait de manière directe des textes sacrés. Blondel appelle « extrincécisme » cette première attitude qui fait refluer, sans intermédiaire, le dogme sur l’histoire. Elle n’examine « pas les faits pour eux-mêmes », mais vise seulement à en détacher « un signe, une étiquette » sans se soucier du lien entre tel ou tel événement historique et sa portée miraculeuse, ni du lien entre les faits et les idées ni même entre les données théologiques objectives « et notre pensée ou notre vie propres (p. 151)54

C’était l’attitude de certains théologiens rigides pour qui l’argument d’autorité dispensait de toute recherche scientifique (Dans une lettre à un ami, Blondel désigne plaisamment cette attitude du nom de « théologite »). Mais c’était aussi l’attitude de nombreuses personnes bien disposées, marquées par leur éducation chrétienne55

Devant cette crise Blondel signale le raidissement de certains qu’on appellera plus tard intégrisme, un mot forgé dans le contexte antimoderniste selon G. Mosseray. Mais Blondel prend aussi la mesure de la crise de l’Église et met en cause aussi bien ceux qui sont troublés par « la cécité de ceux qui ferment les yeux sur les faits » (soit les partisans de la « théologite ») que ceux (les partisans de la « criticite »), qui sont ébranlés par «les affirmations troublantes de ceux qui cherchent trop la lumière en eux56.» Cette seconde attitude est ce que Blondel appelle l’« historicisme ».

Critique de l’« historicisme » ou de la « criticité »

 

Loisy (1857-1940) sur lequel et à qui Blondel écrivit beaucoup

Cette attitude, « au lieu de faire refluer le dogme sur l’histoire (…) cherche à montrer comment l’histoire et l’histoire seule, peut rendre compte de tout le développement du christianisme57.», les deux attitudes partageant le présupposé, selon Geneviève Mosseray, d’un passage direct de l’idée au fait ou l’inverse. Pourtant, si c’est Loisy qui est visé par Blondel, Blondel lui-même ne contestait pas l’autonomie de l’histoire dans son ordre ni d’ailleurs la volonté d’inscrire l’histoire de l’Église dans les lois humaines de la société, cette action divine (à supposer qu’elle existe), ne faisant pas « nombre avec les faits qui gardent leur intelligibilité propre57.» Cependant, Blondel fut déçu par la volonté de Loisy de s’en tenir aux faits sans s’intéresser à d’autres problèmes comme celui de l’âme de Jésus. Il s’explique comme suit : « L’histoire réelle est faite de vies humaines ; et la vie humaine, c’est la métaphysique en acte. Prétendre constituer la science historique en dehors de toute préoccupation idéale, supposer même que la partie inférieure ou la cuisine de l’histoire peut être, au sens étroit du mot, une constatation positive, c’est, sous prétexte d’une neutralité impossible, se laisser dominer par des partis pris – des partis pris comme tout le monde en a forcément, dès lors qu’on n’a pas acquis une conscience réfléchie de ses propres attitudes d’esprit ni soumis à une critique méthodique les postulats sur lesquels on fonde ses recherches58

Or le positivisme de l’époque empêchait de voir la pertinence de ce point de vue, selon Geneviève Mosseray, et interdisait aussi selon elle toute étude de la conscience que Jésus pouvait avoir de son action. On connaît l’affirmation centrale de Loisy : « Le Christ a annoncé le Royaume, mais c’est l’Église qui est venue » 59. Mais la question de savoir si le Christ a fondé l’Église ou s’il est seulement « l’initiateur occasionnel d’un mouvement humanitaire60.», est une question que peut certes poser l’historien mais qu’il ne peut pas trancher définitivement. Si la vie humaine est de la métaphysique en acte, il ne peut, selon Jérôme Levie et Jérôme Moreau, « y avoir en histoire des constatations purement positives : derrière chaque action qu’il présente, l’historien introduit nécessairement des croyances, des interprétations, des idées métaphysiques54

La solution blondélienne : la tradition créatrice ou vivante

Certes, poursuit Geneviève Mosseray, le christianisme se présente comme un fait, mais il y a différents sens à ce terme : succession chronologiquesuccession logique et continuité organique. Pour passer de la succession chronologique aux autres significations, « l’historien doit chaque fois faire intervenir une idée directrice qui lui permet d’organiser ses observations et de leur donner un sens60.» Il faut trouver un intermédiaire entre le dogme et l’histoire et c’est la tradition qui n’est pas une attitude tournée vers le passé uniquement mais aussi vers l’avenir, qui n’est pas la simple transmission orale à côté des textes de l’écriture, mais « l’action même des croyants qui vivent du message évangélique61.» « L’Église » poursuit Geneviève Mosseray, « par sa tradition vivante s’assure la permanence de l’esprit de son fondateur, dans le dynamisme de son propre mouvement spirituel à travers l’histoire61.» Pour Blondel, cette tradition est « puissance conservatrice mais en même temps conquérante » qui a « sans cesse à nous apprendre du nouveau parce qu’elle fait passer quelque chose de l’implicite vécu à l’explicite connu » et « sert à nous faire atteindre, sans passer exclusivement par les textes, le Christ réel qu’aucun portrait littéraire ne saurait épuiser ni suppléer 62.» Pour Jean-Louis Vieillard-Baron, cette tradition participe de la Communion des saints, « exemple même de l’union entre dogme et pratique63

Voici donc selon G. Mosseray les trois thèmes que Blondel développe dans Histoire et dogme : « critique de l’extrincésisme qui cherche à confirmer directement le dogme par l’histoire; critique de l’historicisme qui tente de réduire le christianisme à son devenir observable ; nécessité de recourir à la tradition vécue pour comprendre le passage des faits aux idées61

Les difficultés de Blondel avec les théologiens

Sur le site des archives de Maurice Blondel de l’Institut supérieur de philosophie de Louvain-la-neuve on peut lire « En 1896, sa Lettre sur l’apologétique lui attire l’hostilité des théologiens qui l’accusent de ne retenir du christianisme que ce qui paraît acceptable à la pensée contemporaine et l’auteur est pris dans les remous de la crise moderniste. Il n’est cependant atteint par aucune condamnation romaine »4.

Heiner Wilmer estime64, citant René Virgoulay65, que « l’encyclique Pascendi visait aussi sans aucun doute Blondel et Laberthonnière, même s’ils n’étaient pas nommés ». En 1913, Lucien Laberthonnière avait déjà vu deux de ses livres condamnés et cette année-là, c’est la revue Annales de philosophie chrétienne qui fut mise à l’Index, condamnant Laberthonnière au silence. À partir de cette date la grande amitié qui l’unissait à Blondel s’altéra pour ne plus jamais se renouer66. Cela peut s’expliquer par le fait que Blondel se mit à étudier le thomisme dont Laberthonnière pensait qu’il corrompait « l’originalité du christianisme »67.

Bien qu’aucune condamnation n’ait jamais atteint Maurice Blondel, celui-ci au témoignage d’Henri Bergson continuait à se préoccuper, bien longtemps après la crise moderniste, des critiques de la théologie. Bergson parle le 26 avril 1932 au philosophe Jacques Chevalier des réactions qu’a suscitées son livre Les Deux Sources de la morale et de la religion dans les milieux catholiques et notamment celle de Maurice Blondel dont il dit : « Blondel est très aimable mais on sent chez lui comme une phobie d’être condamné »68. Jacques Chevalier avait d’ailleurs écrit une bonne semaine auparavant au nonce apostolique Mgr Maglione pour le mettre en garde contre une condamnation de ce livre[Lequel ?]69.

Dans Le Problème de l’acte de foi dont la première édition paraît en 1945, Roger Aubert souligne ce qu’il appelle « les dangers du blondélisme » dans la mesure où en considérant la foi surnaturelle « comme une vie dont on doit expérimenter la vérité en la vivant », Blondel, même s’il avertit que cela ne signifie pas que cette vérité vienne de nous, a eu le tort de mettre en cause la « démonstration historique de la révélation », oubliant ainsi selon Aubert que « la foi est une connaissance propter auctoritatem Dei revelantis [fondée sur l’autorité de Dieu qui la révèle]70. » Pierre Colin auteur de L’Audace et le soupçon paru en 1997, ouvrage qui traite de la crise moderniste sous l’angle philosophique rappelle à cet égard que les modernistes estimaient que la religion découlait du sentiment religieux jaillissant par immanence (et non par une révélation externe ou transcendante se déployant dans l’histoire) des « profondeurs de la conscience71. » Or, poursuit Pierre Colin, quand paraît le  l’encyclique Pascendi, Blondel est d’abord effondré et l’écrit le  à un ami prêtre, l’abbé Wehrlé : « je succombe sous l’encyclique72 ». Il se raffermit cinq jours plus tard estimant que ce n’est pas la méthode d’immanence qui avait été mise en cause (ce qui veut dire que Blondel estime qu’il y a quelque chose en l’homme qui en appelle à une révélation comme la révélation chrétienne), mais l’idée que le surnaturel ou la révélation surgissent « de l’homme ou à travers l’homme, d’en bas exclusivement72. »

Blondel resta cependant en butte à de telles critiques que l’archevêque d’Aix François Bonnefoy put estimer, dix ans après Pascendi, « de son devoir » de lui répéter l’assurance qu’il avait reçue de la bouche même de Pie X en 1912 « Je suis sûr de son orthodoxie » et d’ajouter « que vous faire dire que l’intelligence humaine trouve elle-même la vérité, tandis qu’elle la reçoit et se l’assimile, c’est déformer toute votre œuvre »73. Heiner Wilmer pense néanmoins que durant « toute son activité de professeur à Aix-en-Provence planait sur sa tête, telle une épée de Damoclès, le soupçon de modernisme74.» Il en voit pour preuves les nombreux pseudonymes que Blondel utilisa pour signer certaines publications et les énumère : L’Alpin, Maurice de Marie, Bernard Aimant, François Mallet, Bernard de Sailly, Testis, Yves Plounémour, Marcel Breton.

La non-réédition de l’Action, après l’épuisement de la première édition, a aussi alimenté les spéculations. Blondel y répondait en 1913 « si je n’ai pas remis en circulation un livre totalement épuisé depuis 1895, c’est que dès lors, j’avais d’importantes modifications à y introduire75 ». Mais s’il concède que son texte ancien peut être « incomplet », plus « équivoque » qu’il ne réussit à le voir et sûrement très imparfait, c’est pour attester son « intention initiale et permanente ». De fait le temps mis par Blondel à remanier l’Action pour arriver à la version de 1937 laissa longtemps ses lecteurs dans la nécessité, lorsqu’ils voulaient disposer de nouveaux exemplaires, de la recopier par des moyens artisanaux.

Œuvres

  • L’action : essai d’une critique de la vie et d’une science de la pratique, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1893, P.U.F, 1950
  • Lettre sur les exigences de la pensée contemporaine en matière d’apologétique et sur la méthode philosophique dans l’étude du problème religieux, Annales de Philosophie Chrétienne, janv.-juillet 1896.
  • Histoire et dogme, les lacunes philosophiques de l’exégèse moderne, Impr. Librairie de Montligeon, 1904. Dans cette série de trois articles publiés en janvier-février 1904 dans la revue La Quinzaine, Blondel répond à quelques problèmes soulevés par L’Evangile et l’Église d’Alfred Loisy, ouvrage paru l’année précédente. Il y renvoie dos à dos l' »extrinsécisme » (Utilisation de la Bible comme si les faits bibliques étaient extrinsèques à leur signification (attitude fréquente chez les théologiens catholiques de l’époque) et l' »historicisme » (majoration de l’importance de la science historique dans la foi chrétienne).
  • L’itinéraire philosophique de Maurice Blondel (propos recueillis par F. Lefèvre), Spes, Paris, 1928
  • Le problème de la philosophie catholique, Paris, Bloud & Gay, 1932
  • La Pensée Tome 1 – La genèse de la pensée et les paliers de son ascension spontanée, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1934
  • La Pensée Tome 2 – les responsabilités de la pensée et la possibilité de son achèvement, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1934
  • L’Être et les êtres – Essai d’ontologie concrète et intégrale, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1935, P.U.F, 1963
  • L’Action. vol. I: Le problème des causes secondes et le pur agir, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1936. Nouvelle édition P.U.F., Paris, 1949
  • L’Action. vol. II: L’Action humaine et les conditions de son aboutissement, Paris, Félix Alcan, coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1937. Nouvelle édition Paris : P.U.F., 1963. Ce volume est une version revue et corrigée de l’Action de 1893
  • Lutte pour la civilisation et philosophie de la paix, Paris, Flammarion, Bibliothèque de philosophie scientifique, 1939. Nouvelle édition 1947
  • La philosophie et l’esprit chrétien, T. 1: Autonomie essentielle et connexion indéclinable, Paris, P.U.F., coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1944. Nouvelle édition, 1950
  • La philosophie et l’esprit chrétien, T.2: Conditions de la symbiose seule normale et salutaire, Paris, P.U.F., coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1946
  • Exigences philosophiques du christianisme, Paris, P.U.F., coll. «Bibliothèque de philosophie contemporaine», 1950
  • Lettres philosophiques, Paris, Aubier, 1961
  • Carnets intimes, Tome 1 (1893-1894), Cerf Paris, 1961 et Tome 2 (1894-1949), même édition, Paris, 1966.
  • Notes d’Esthétique (1878-1900), établies, présentées et annotées par Sante Babolin, Rome, P.U.G., 1973, 349 p.
  • « La crise de l’Action française (1926-1929) à travers la correspondance Blondel-Archambault » (introduction de Yves Palau), Mil neuf cent. Revue d’histoire intellectuelleno 13, 1995.
Les Œuvres complètes de Maurice Blondel sont publiées aux P.U.F. 
  • Œuvres complètes / Maurice Blondel : Tome 1, 1893 : Les deux thèses, Presses Universitaires de France – PUF,  (ISBN 978-2130463702)
  • Œuvres complètes / Maurice Blondel : Tome 2, 1888-1913, la philosophie de l’action et la crise moderniste, Presses Universitaires de France – PUF, (ISBN 978-2130481560)

Distinctions

Prix Jean-Reynaud de l’Académie des sciences morales et politiques (1943)76

Membre associé de l’Académie des Lyncéens (1947)77

Officier de la Légion d'honneur Officier de la Légion d’honneur78

Bibliographie

  • Frédéric LefèvreL’itinéraire philosophique de Maurice Blondel, Éditions Spes,, 1929
  • Maurice Blondel-Auguste Valensin, Correspondance, Montaigne, Paris, 1957.
  • Pierre HenriciHegel und Blondel, Pullach/Munchen, Berchmanskolleg, 1958.
  • Pierre De Cointet, Maurice Blondel, Un Réalisme Spirituel, collection Humanités,  éd. Parole Et Silence, 2001.
  • Emmanuel Gabellieri et Pierre de Cointet, Maurice Blondel et la philosophie française, colloque tenu à Lyon, 24-26 janvier 2005, Parole et silence, Paris, 2007, texte partiellement en ligne [archive]
  • René Virgoulay,
    • Philosophie et théologie chez Maurice Blondel, Paris, Éditions du Cerf, Philosophie et Théologie, 2002, 214 p.
    • Blondel et le modernisme, La philosophie de l’action et les sciences religieuses (1896-1913), Cerf, 1980.
    • L’Action de Maurice Blondel – 1893 – relecture pour un centenaire, Éditions Beauchesne, 1992, (ISBN 2-7010-1266-X et 978-2-7010-1266-7)texte partiellement en ligne [archive]
    • Le Christ De Maurice Blondel, collection : Jésus et Jésus-Christ,  éd. Desclée-Mame, 2003.
  • Philippe CapellePhilosophie et Apologétique – Maurice Blondel Cent Ans Après, Cerf, 1999.
  • Jean Leclercq, Maurice Blondel lecteur de Bernard de Clairvaux, Éditeur : Lessius, collection : donner raison, 2001 (ISBN 2-87299-102-6)
  • Paul ArchambaultVers un réalisme intégral, L’œuvre philosophique de Maurice Blondel,  éd. Librairie Bloud & Gay, 1928
  • Marie-Jeanne Coutagne :
  • Emmanuel Tourpe (éd.), Penser l’être de l’action. La métaphysique du ‘dernier’ Blondel, Peeters, 2000
  • Xavier Tilliette Philosophies eucharistiques de Descartes à Blondel, Éd. Du Cerf, 2006.
  • Jean-Hugues Soret, Philosophies de l’Action catholique : Blondel-Maritain,  éd. Du Cerf.
  • Joseph de TonquédecDeux études sur « la Pensée » de M. Maurice Blondel : la doctrine de la connaissance la question du surnaturel, Gabriel Beauchesne et ses fils, , 177 p. (présentation en ligne [archive])
  • Marc Leclerc, Blondel entre l’Action et la Trilogie. Actes du Colloque international sur les « écrits intermédiaires » de Maurice Blondel, tenu à l’Université Grégorienne à Rome du 16 au 18 novembre 2000, Collection Donner Raison, Éditions Lessius, 2003.
  • Alain Létourneau, L’herméneutique de Maurice Blondel, son émergence pendant la crise moderniste, Les Éditions Fides, 1998, (ISBN 2-89007-878-7 et978-2-89007-878-9)texte partiellement en ligne [archive]
  • Pierre GauthierNewman et Blondel : Tradition et développement du dogmeÉditions du Cerfcoll. « Cogitatio Fidei » (no 147), , 553 p. (ISBN 9782204028547,OCLC 18778626)
  • Lecture blondélienne de Kant dans les principaux écrits de 1893 à 1930, vers un dépassement de l’idéalisme transcendental dans le réalisme intégral de Diogène Bidéri,  éd. Pontificia Università Gregoriana, 1999, (ISBN 88-7652-839-3 et 978-88-7652-839-2)texte partiellement en ligne [archive]
  • (de) Heiner WilmerMystik zwischen Tun und Denken : ein neuer Zugang zur Philosophie Maurice Blondels, Fribourg-en-Brisgau, Herder, 
  • Heiner Wilmer (trad. de l’allemand par Félicien le Douaron et Jean Dubray), Mystique entre action et pensée : une Nouvelle Introduction à la philosophie de Maurice Blondel, Paris, BoD, , 332 p. (ISBN 978-23220-112-4-7présentation en ligne [archive])
  • (en) Oliva Blanchette, Maurice Blondel, A Philosophical Life, Wm. B. Eerdmans Publishing, 2010, (ISBN 0-8028-6365-5 et 978-0-8028-6365-2)texte partiellement en ligne [archive]
  • (en) Peter J. Bernardi, Maurice Blondel, social Catholicism, & action française. The clash over the church’s role in society during the modernist era,  éd. CUA Press, 2009, (ISBN 0813215420 et 978-0-8132-1542-6)texte partiellement en ligne [archive]
  • (pt) Mario Antonelli, Maurice Blondel, Edicoes Loyola, 1999, (ISBN 88-372-1754-4 et 978-88-372-1754-9)texte partiellement en ligne [archive]
  • Adrien Diakiodi, Maurice Blondel, Un sociologue arraché à l’oubli, L’Harmattan, 2015, (ISBN 978-2-343-06015-6)
  • Henry DuméryRaison et religion dans la philosophie de l’action, Paris, Seuil, 1963

Notes et références

  1.  Jean Lacroix, Maurice Blondel, PUF, Paris, 1963, p. 1.
  2. ↑ a b et c Jean Lacroix, article Blondel Maurice 1861-1949 dans René Huisman directeur, Dictionnaire des philosophes, Presses universitaires de France, Paris, 1984, p. 331-335, p. 332.
  3.  René Virgoulay, L’Action de Maurice Blondel – 1893 – relecture pour un centenaire, Éditions Beauchesne, Paris, 1992, p. 9.
  4. ↑ a et b Centre d’archives Maurice Blondel [archive]
  5.  Mickael Sutton in Michel Leymarie et Jacques Prévotat (éd.), L’Action française, culture, société, politique, Presses Universitaires du Septentrion, Villeneuve d’Ascq, 2008, p. 348.
  6.  L. Brunschvicg, Lettre à Vladimir JankélévitchParis, cité in F. Chaubet, « Léon Brunschvicg, destin d’un philosophe sous l’Occupation », dans P. Mercier & C. PérezActes du colloque « Déplacements, dérangements, bouleversement : Artistes et intellectuels déplacés en zone sud (1940-1944) » à la Bibliothèque de l’AlcazarUniversité de ProvenceMarseille, 3-4 juin 2005 (lire en ligne [archive]).
  7.  Histoire, dogme et critique dans la crise moderniste, avant-propos de la 3e édition, Albin-Michel, Pars, 1996, p. LXXI, note 115.
  8.  Daniel Bourgeois, « Le veilleur philosophe »[archive du ], sur Paroisse Saint-Jean-de-Malte.
  9.  « Nos amis défunts », La Croixno 11048,‎ p. 2 (lire en ligne [archive])
  10.  « Correspondances : Blondel André (1863-1938) » [archive], sur Université catholique de Louvain.
  11.  L’Action – Essai d’une critique de la vie et d’une science de la pratique, Paris, 1893, p.VII.
  12.  Jean Lacroix, Maurice Blondel, op. cit., p. 11-12.
  13.  L’Action, op. cit., p. VII.
  14.  Charles Moeller Blondel, la dialectique de l’unique nécessaire in Au seuil du christianisme, Les éditions universitaires, Lumen Vitae, Paris-Bruxelles, 1952, p. 99-157p. 112.
  15.  L’Action, p. VIII.
  16.  L’Action, PUF, Paris, 1936, p. 222-223
  17.  Maurice Blondel, L’action (1893), PUF, 2e édition, 2013, (ISBN 978-2-13-062446-2) (notice BnFno FRBNF43585272)
  18.  C.Moeller, op. cit., p. 115.
  19.  C.Moeller, op. cit., p. 116.
  20.  Pierre Colin, L’Audace et le soupçon, DDB, Paris, 1997,p. 193.
  21.  Mathias Neblel, « Action de Dieu, action de l’homme », dans Tranversalités, 2013/4 (no 128), p. 151-168p. 154. Lire en ligne [1] [archive].
  22.  C’est ainsi que le général de Gaulle résuma un jour à l’ambassade de France plusieurs passages de Ainsi parlait Zarathoustra : « Il faut également rappeler l’influence profonde de Nietzsche, et une des dernières citations, en Irlande, à l’Ambassade de France est celle du désabusement, paraphrasant le cri de détresse de Zarathoustra : « Rien ne vaut rien, il ne se passe rien et cependant tout arrive mais cela est indifférent ». » Cf. Alain Larcan, « Les passions littéraires du général de Gaulle » [archive] (consulté le 31 mai 2018)
  23.  Paul Archambault, Initiation à la philosophie blondélienne en forme de court traité de métaphysique, Librairie Bloud & Gay, Paris, 1941, p. 67-68.
  24.  L’Action, Tome II, Paris 1936, p. 6.
  25.  R.Virgoulay, op. cit., p. 41.
  26.  Blondel, L’Action2e édition, p. 179.
  27.  C.Moeller, op. cit.,p. 127.
  28.  L’Action2e édition, Tome II, p. 263-264.
  29.  C.Moeller, op. cit., p. 132.
  30.  C.Moeller, op. cit., p. 133. Le souligné est de Moeller.
  31.  C.Moeller, op. cit.,p. 133.
  32.  C.Moeller, op. cit., page 134 et page 135.
  33.  René Virgoulay, L’Action de Maurice Blondel – 1893 – relecture pour un centenaire, Beauchesne, Paris, 1992, p. 74.
  34.  L’Action1re édition, p.387.
  35.  Henri Bouillard, Comment aller au-devant du christianisme in Le Monde du 4 avril 1974.
  36.  Lettre à la Revue pratique d’Apologétique. Citée dans Maurice Blondel, Œuvres complètes, op. cit., p. 766.
  37.  Citée dans Maurice Blondel, Œuvres complètes, op. cit., p. 766.
  38.  Lucien Laberthonnière (Marie-Thérèse Perrin) (préf. Mgr Paul Poupard), Laberthonnière et ses amis L. Birot – H. Brémond – L. Canet – E. Le Roy … : dossiers de correspondance (1905-1916), Paris, Éditions Beauchesne, coll. « Théologie historique » (no 33), , 313 p. (présentation en ligne [archive])p. 59
  39.  A. de Jaer et A. Chapelle, La noétique et la pneumatique chez Maurice Blondel in Revue philosophique de Louvain, Tome 69, 1961, p. 600-630.
  40.  Maurice BlondelLa Penséet. I : La genèse de la pensée et les paliers de son ascension spontanée, Paris, Félix Alcan,  (lire en ligne [archive])p. 272.
  41.  A. de Jaer et A. Chapelle, La noétique et la pneumatique chez Maurice Blondelp. 616.
  42.  A. de Jaer et A. Chapelle, art. cit.,p. 619.
  43.  Paul Archambault, Initiation à la philosophie blondélienne en forme de court traité de métaphysique, Paris, Librairie Bloud & Gay, p. 42.
  44.  Maurice Blondel, La Pensée Tome I, op. cit., p. 274.
  45.  A. de Jaer et A. Chapelle, art. cit., p. 623.
  46.  Archambault,op. cit., p. 43.
  47.  Archambault, op. cit, p. 44.
  48.  Maurice Blondel, La Pensée, tome I, p. 201-202.
  49.  Jean Lacroix, Maurice Blondelp. 47-48.
  50.  L’Être et les êtresp. 143.
  51.  le titre complet ajoute en matière d’apologétique et sur la méthode de la philosophie dans l’étude du problème religieux et paraît en six parties dans les Annales de philosophie chrétienne en janvier, février, mars, mai, juin et juillet 1886
  52.  Claude Troisfontaines dans Maurice Blondel Œuvres complètes, Tome II, 1883-1913 La Philosophie de l’action et la crise moderniste, Texte établi et présenté par Claude Troisfontaines, PUF, Paris, 1997, Modèle:P.XXXIII
  53.  Maurice Blondel, Histoire et dogmep. 152.
  54. ↑ a et b Jérôme Levie , Jérôme Moreau, Tension entre foi et histoire : l’apport inestimable de Maurice Blondel, dans Résurrection, mars-juin, 2011, consulté le 11 mars 2017 [archive]
  55.  « Au feu de la critique », J. Malègue lecteur de Blondel, in Les écrivains et leurs lectures philosophiques, L’Harmattan, Paris, 1996, p. 73-89.
  56.  Blondel, op. cit., p.160.
  57. ↑ a et b .G.Mosseray, op. cit., p.81.
  58.  Blondel, op. cit., p. 168.
  59.  Alfred Loisy, L’Évangile et l’Église, Paris, Alphonse Picard et fils, p. 110-112
  60. ↑ a et b G.Mosseray, op. cit., p. 82.
  61. ↑ a b et c G.Mosseray, op. cit., p.83.
  62.  Blondel, op. cit. p. 204p. 204-205 et p. 205.
  63.  Jean-Louis Vieillard-Baron, Un problème philosophique : la communion des saints, dans Transversalités, 2010, ‘, p. 95-16p. 107.
  64.  Wilmer 2014p. 92
  65.  Blondel et le modernisme, Cerf, Paris, 1980, p. 231-238. Compte rendu en ligne [2] [archive]
  66.  Wilmer 2014p. 75-76
  67.  Wilmer 2014p. 76 note que l’éloge funèbre Le P. L. Laberthonnière (1860-1932), écrit par lui dans la Revue de métaphysique et de moraleno 39, 1932, suppl. 16 [lire en ligne [archive]], n’est pas signé.
  68.  Jacques Chevalier, Entretiens avec Bergson, Paris, Plon, , 315 p. (présentation en ligne [archive])p. 163
  69.  Jacques Chevalier op. cit., p. 161.
  70.  Roger Aubert, Le Problème de l’acte de foi, Bruxelles, 1945, p. 293.
  71.  Pierre Colin cite ici l’ouvrage de G.Lenert, Moderniste sans le savoir dans L’Audace et le soupçon, p. 315.
  72. ↑ a et b Cité par Pierre Colin, op. cit., p. 316.
  73.  « Document : lettre de Mgr l’archevêque d’Aix à Maurice Blondel », Nouvelles de l’Institut catholique de Parisno 4,‎ p. 72 (lire en ligne [archive])
  74.  Wilmer 2014p. 220.
  75.  Blondel, lettre à la Revue du clergé françaisŒuvres complètes, tome II, PUF, 1997, p. 811
  76.  « A l’Institut : le grand prix Jean Reynaud à M. Maurice Blondel », La Croix de Provenceno 2605,‎ p. 1 (lire en ligne [archive])
  77.  (it) « Annuario della Accademia Nazionale dei Lincei » [archive] [PDF]p. 373
  78.  « Cote 19800035/271/36270 » [archive]base Léonoreministère français de la Culture

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